Alors que l’armée de Terre américaine poursuit activement le développement de ses capacités robotiques de nouvelle génération, avec pour objectif ambitieux de déployer les premières Formations Intégrées Homme-Machine (HMIF pour « Human Machine Integrated Formation ») d’ici 2027, les projets se multiplient un peu partout dans le monde pour poursuivre la modernisation d’une capacité devenant peu à peu incontournable sur le champ de bataille.
En France, la Loi de Programmation Militaire 2024-2030 a alloué 5 milliards d’euros aux drones et robots, l’objectif fixé pour 2030 étant la livraison de plateformes polyvalentes terrestres de combat. De fait la Direction générale de l’armement (DGA) a notifié, le 30 décembre 2024, aux industriels KNDS France et Safran Electronics & Defense un accord-cadre dans le domaine de la robotique terrestre répondant au nom de DROIDE : « en appui au combat débarqué, le robot terrestre augmentera les capacités du groupe de combat tout en limitant l’exposition des soldats », précisait en février dernier le site du ministère des Armées à ce propos.
iMUGS2, symbole d’une architecture européenne de plus en plus opérationnelle
Le domaine de la robotique militaire connaît de façon générale une accélération significative en Europe avec différentes initiatives dont la plus ambitieuse est celle menée par le consortium iMUGS2 auquel appartiennent de fait les deux industriels français.
Lancé en 2019, le projet iMUGS (pour « Integrated Modular Unmanned Ground System ») représente l’une des initiatives les plus importantes de l’Union européenne dans le domaine de la robotique militaire. Doté d’un budget total de 32,6 millions d’euros, dont 30,6 millions octroyés par la Commission européenne via le Programme européen de développement de l’industrie de Défense (PEDID), ce projet répond officiellement à l’appellation « EDIDP-MUGS-2019 Architecture polyvalente pour systèmes terrestres sans pilote et solutions pour l’intégration de systèmes et la collaboration homme-machine ».
Cherchant à développer un système terrestre sans pilote standardisé à l’échelle européenne, iMUGS avait pour objectif le développement d’une architecture modulaire, cybersécurisée et évolutive pour systèmes hybrides avec et sans pilotes, visant à standardiser un écosystème de plateformes aériennes et terrestres, d’équipements de commande, de contrôle et de communication, de capteurs et d’algorithmes.
Coordonné par l’Estonie et regroupant plusieurs pays européens – dont la France, la Belgique, l’Espagne, la Lettonie, l’Allemagne et la Finlande -, iMUGS a fait ses preuves résultant de la coopération initiale entre quatorze partenaires : Milrem Robotics (le coordinateur du projet dont le socle est le robot terrestre THeMIS), Safran et KNDS déjà mentionnés, mais aussi GT Cyber Technologies, Krauss-Maffei Wegmann, Diehl Defence, Bittium Wireless, Insta DefSec, (Un)Manned, dotOcean, Latvijas Mobilais Telefons, GMV Aerospace and Defence, l’Académie militaire estonienne et l’École royale militaire de Belgique.
Suite au succès du premier projet iMUGS achevé fin 2023, le consortium s’est considérablement élargi avec vingt-neuf partenaires issus de quinze pays de l’UE et a poursuivi ses travaux avec iMUGS2 sur la base d’une proposition officielle soumise en novembre 2024 en réponse à l’appel du Fonds européen de défense (EDF) désigné EDF-2024-DA-GROUND-UGS-STEP.
L’objectif d’iMUGS2 est lui aussi ambitieux : développer un système terrestre sans pilote capable de collaborer à la fois avec des plateformes robotiques autonomes (« teaming unmanned-unmanned ») et avec des véhicules d’infanterie pilotés par des humains (« teaming manned-unmanned »).
Le but est de développer des technologies qui seront déployables d’ici 2030, faisant ainsi la transition des systèmes expérimentaux vers des solutions complètement opérationnelles.
Les obstacles à surmonter demeurent tant pour les Etats-Unis que pour les Européens le degré d’autonomie des robots, la gestion de la saturation cognitive de leurs utilisateurs et le contrôle de ces capacités amenées à être « au contact » et donc susceptibles d’être capturées par l’ennemi.
(Par Murielle Delaporte)
Photo © Milrem Robotics (https://milremrobotics.com/eu-projects/imugs2/)